La légende de la Sara-yashiki
À 40 km de Kobe se trouve un magnifique château blanc, le Himeji-jō, dont les murs sont imprégnés d’une terrifiante et très célèbre histoire de fantômes.
« Une assiette … Deux assiettes … Trois assiettes … ». À ces quelques mots, les habitants de la ville de Himeji frémissent à l’idée de rencontre la belle Okiku.
Nous sommes à l’époque Edo, dans la maison d’un vice-gouverneur de Himeji nommé Aoyama Tetsuzan. Celui-ci avait embauché une belle jeune femme qui s’appelait Okiku. Douce, calme et serviable, voilà 3 qualités que recherchait cet homme chez une femme. Il tenta à plusieurs reprises de conquérir son cœur. Mais rien n’y faisait, la jeune femme ne succombait pas à ses charmes. Frustré et mécontent de cette situation, il se dit alors que s’il n’était pas à lui alors elle ne donnerait son amour à personne.
Chaque jour, Okiku essuyait de belles assiettes qu’elle tenait en admiration. Il y en avait là 10, pas une de moins. Un jour, le vice-gouverneur vint inspecter ses assiettes et il déclara qu’il n’y en avait que 9 et il s’exclama : « Okiku ! Il manque une assiette et tu es la seule à les regarder avec tant d’envie. Tu es une voleuse ! Je ne peux pas laisser ce crime impuni ! »
Okiku était comme paralysée et elle ne put répondre à cela. Il attrapa l’innocente et il l’emmena à l’extérieur. Alors que la saison des pluies bat son plein, il l'attacha à un pin dans le jardin du château et la frappa avec du bambou vert 3 fois par jour et 3 fois par nuit. S’en suivirent 17 jours de châtiments effroyables. Okiku pleurait et plaidait son innocence, mais Tetsuzan n’écoutait rien. Il la suspendit avec une corde grossière et il la fit monter et descendre dans un puits situé dans l’enceinte du château. Ensuite, il lui coupa l'épaule avec une épée et la noya dans le puits. On raconte que Tetsuzan est devenu malade et fou suite à son acte et qu’il en périt. Mais il est bien plus probable que sa mort soit due à la vengeance d’Okiku, au fond de son puits.
Depuis ce drame horrible et la nuit seulement, du côté du puits, on peut entendre une voix gémissante qui compte frénétiquement les assiettes de son bourreau : « Une assiette … Deux assiettes … Trois assiettes … ».
Si vous l’entendez aussi, fuyez avant d’entendre le chiffre 9. Car on raconte que ceux qui écoutent Okiku jusque-là sont pris de convulsions et ils meurent sur le coup.
La demeure reste dans les esprits comme étant « la demeure aux assiettes » (皿屋敷 – Sara Yashiki) et le puits est appelé « puits d’Okiku » (お菊井戸) depuis ce temps-là. On dit que le puits se trouve sous le deuxième niveau du donjon du château de Himeji mais il s'agirait en fait d'une voie de communication secrète avec l'extérieur du château et non d’un vrai puits. D’où l’importance de cette histoire de fantôme afin que personne ne puisse s'en approcher. Par ailleurs, comme la légende d'Okiku existe depuis avant le château de Himeji, il est fort probable que le puits se trouve en fait dans au temple Goken-tei de Himeji. La vérité sur le puits d'Okiku reste néanmoins un mystère qu’il vaut peut-être mieux pas tenter de résoudre ...
Article écrit le 02 mai 2023, par l'auteur Kévin Tembouret. Il s'agit d'un extrait du livre "Croyances et légendes urbaines japonaises: Histoires populaires, superstitions et malédictions au Japon".
